Comment aider un ami suicidaire

Il y a quelques années, un ami proche fort déprimé eut l’idée de se suicider. Une expérience qu’il me confia dans sa période la plus sombre m’a appris une leçon sur l’amitié.

« Tu m’as probablement sauvé la vie ! »

La gravité de ses propos me sidéra. Lors de l’un des déjeuners hebdomadaires que nous prenions ensemble, mon ami marqua une pause, me regarda droit dans les yeux, et c’est ce qu’il me dit. C’était l’une des déclarations les plus marquantes qu’on m’ait faites.

Ses propos se situaient dans le contexte de notre discussion sur son bien-être à ce moment-là. Mon ami, un ancien associé, était fier de m’annoncer que – pour la première fois depuis des années – il se sentait « normal ».

Selon lui. Son bien-être était dû à ce que, mis à part plusieurs années de thérapie de groupe, il avait enfin réussi à prendre ses médicaments, et cela l’avait aidé à s’extirper des profondeurs obscures de la dépression. Il se trouvait à une étape dans sa vie où il se sentait enfin heureux.

Sa trajectoire positive l’avait aidé à maitriser son régime alimentaire et sa santé et cela lui avait permis de faire plusieurs choses dont il avait toujours rêvé. Parvenir à cet état avait néanmoins été fort laborieux.

Quand j’ai failli perdre mon ami

Quand il m’avoua : « Tu m’as probablement sauvé la vie ! », il faisait allusion à quelque chose qui s’était produit il y a des années.

Nous étions associés dans un commerce qui avait connu des temps difficiles dans la crise de 2008. La plupart de nos contrats informatiques de base étaient avec des fabricants et des grossistes qui avaient été durement frappés et, de ce fait, nous l’avions aussi été.

À l’époque, j’avais appris que mon ami était dépressif et se trouvait dans un point très bas dans sa lutte. De temps à autre, il m’avouait avoir pensé mettre fin à ses jours pour échapper à la douleur et aux ténèbres invalidantes qui étaient son lot quotidien.

Un jour, en revenant d’un bref congé, à faire de la plongée, il m’avait avoué avoir sérieusement eu envie, assis sur la plage, d’aller se perdre dans les vagues… et ne plus jamais revenir. 

Entendre mon ami me faire un tel aveu était déchirant. Je l’avais pris au sérieux et j’avais essayé de le soutenir dans sa lutte. Je me suis aperçu, il y a longtemps, que quand quelqu’un dit – même si c’est apparemment « pour blaguer » – qu’il va « en finir », il faut prendre cela pour un cri de désespoir, un appel à l’aide. J’étais cependant soulagé de le voir, encore vivant, et m’avouant ce qu’il avait pensé faire.

Ce soulagement temporaire allait cependant par la suite céder à l’angoisse quand il ne vint pas travailler, pendant deux jours entiers, sans m’avertir et sans laisser de traces. Il ne répondait pas à mes appels.

Je savais qu’il était proche de sa sœur ; je réussis à trouver son numéro et à l’appeler. Mais je découvris qu’elle et les autres membres de sa famille qui vivaient à proximité n’avaient pas eu de ses nouvelles. Saisie de panique, sa sœur avait essayé de le joindre par téléphone et avait même contacté le gérant du groupe d’appartements où il vivait pour pouvoir pénétrer dans son appartement et vérifier s’il allait bien.

Je fus pris d’angoisse ; mes pires craintes semblaient se matérialiser. Quelques heures plus tard, sa sœur m’appela pour me dire qu’il l’avait finalement rappelée, et qu’il était sauf. Je fus à la fois soulagé, irrité, heureux mais aussi frustré quand il finit par m’appeler pour s’excuser de nous avoir, sa famille et moi, tant inquiété. L’écoutant parler, reprenant mon souffle, larmes aux yeux, je lui fis savoir avec force l’angoisse et la peur intense que j’avais éprouvés, pensant l’avoir perdu. Je pense qu’il comprit, vu mon angoisse et mon émotion, à quel point sa vie était précieuse à mes yeux et à ceux de ses chers.

Il est écrit que « les blessures d’un ami prouvent sa fidélité » (Proverbes 27:6). Ce verset revêt dorénavant pour moi une signification plus profonde.

À mon avis, ce n’est pas seulement à cause de cet incident que mon ami me dit « Tu m’as probablement sauvé la vie ». Sans doute faisait-il allusion à toutes ces années que nous avions été amis, dans sa lutte contre la dépression. Il m’avait fait confiance dans son combat bien longtemps avant cet incident, et il savait que je l’écoutais toujours attentivement, l’interrogeant à l’occasion pour qu’il précise sa pensée et m’informant de l’aide qu’il recevait.

Dans le malheur, l’ami se montre un frère

L’une des mesures importantes que vous devez prendre quand vous avez un ami qui se débat dans ce genre de situation est mentionnée dans Proverbes 17:17 : « L’ami aime en toute circonstance, et dans le malheur il se montre un frère » (version Segond 21). Autrement dit, épaulez-le. Renseignez-vous le plus possible sur le combat qu’il mène.

Il existe diverses ressources en librairie, en ligne ou auprès de spécialistes, traitant des moyens d’aider toute personne contemplant le suicide. Les personnes suicidaires semblent souvent repousser les gens ou s’écarter de ceux qui les aiment. Pour elles, la vie fait mal. Elles cessent de savourer les choses et elles peuvent être difficiles à contacter. Il n’est guère facile d’approcher quelqu’un qui est en proie à ce type de dépression et de dialoguer avec lui. Néanmoins, il importe de le faire, même si c’est désagréable.

Savoir écouter est probablement la meilleure chose à faire. Montrez-lui que vous être attentif, que vous vous souciez de lui ou d’elle, souhaitez aider et écoutez.

Beaucoup de gens essaient d’atteindre quelqu’un et de se faire aider avant d’essayer de se suicider. Diverses enquêtes ont révélé que 50% des victimes du suicide recherchent des soins médicaux dans les six mois précédant leur mort. La plupart des individus suicidaires affichent divers signes révélant leurs intentions. Un proche, un ami intime ou un confident peuvent être pour eux un canot de sauvetage.

Et d’après les experts, ce n’est pas en parlant de suicide aux personnes suicidaires qu’on leur donne envie de se suicider. Ils y ont déjà pensé. Discutez  plutôt ouvertement et honnêtement de ce qu’ils pensent et ressentent ; en sachant les écouter et en veillant sur eux, vous leur sauverez peut-être la vie. Être à leurs côtés dans leurs heures les plus sombres sera des plus bénéfiques. Elles ont besoin du genre de personne décrit dans Proverbes 18:24 : « Il y a tel ami plus attaché qu’un frère » (version Ostervald).

Christ a parlé de ce genre d’ami : « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis » (Jean 15:13). Il y a bien des façons de « donner sa vie pour ses amis » – comme en leur faisant savoir à quel point nous nous soucions d’eux ; en prenant soin d’eux dans leurs moments d’angoisse. Efforcez-vous d’être à leurs côtés quand ils ont besoin de vous.

Nous ne pouvons pas toujours empêcher que quelqu’un intente à sa vie, et il y a des personnes qui ne semblent pas du tout être sur le point de se suicider. Néanmoins, souvent une occasion d’aider se présente. Si vous avez un(e) ami(e) qui souffre de grave dépression et qui a des pensées suicidaires, n’oubliez pas qu’il ou elle a le plus besoin de vous.

Il est possible que vous lui sauviez la vie.

 

Comment communiquer avec une personne qui pourrait être suicidaire

Voici six suggestions :

1. Demandez. - Posez-lui la question : «  Penses-tu te suicider ? » La lui poser indique que vous êtes à l’écoute. Tâchez d’être direct, de ne pas la juger, de la soutenir. Fournissez-lui l’occasion de vous parler de la douleur qu’elle ressent. Vous pouvez lui demander en quoi elle souffre et lui proposer de l’aider. Néanmoins, il importe que vous ne promettiez jamais d’en faire un secret.

2. Écoutez. - Prenez-la – et prenez ses réponses – au sérieux et ne les ignorez pas, surtout si elles indiquent qu’elle a des pensées suicidaires. Apprenez quelles sont ses raisons, y compris celles – éventuelles – pour lesquelles elle souhaite continuer de vivre ; c’est important, au niveau de ce qui se passe dans sa vie. Ne lui imposez pas vos raisons pour vivre ; aidez-la plutôt à se concentrer sur ses raisons à elle, de continuer de vivre.

3. Veillez à sa sécurité. - Une fois que vous avez ouvert le dialogue et constaté qu’elle pense au suicide, il importe de déterminer plusieurs choses afin que sa vie ne soit pas en danger. A-t-elle déjà essayé de se suicider avant de vous parler ? De quelle manière mettrait-elle fin à ses jours ? A-t-elle un plan, un moment précis ou la possibilité de mettre son plan à exécution ? La réponse à ces questions peut révéler l’imminence et la sévérité du danger qu’elle court. La protéger signifie l’éloigner de sa méthode de suicide. L’aide d’organismes de prévention du suicide peut être très utile.

4. Soyez là. - Être là, auprès d’une personne qui a envie de se suicider, peut lui sauver la vie. En limitant son isolement et en multipliant ses contacts avec d’autres personnes, cela peut la dissuader de chercher à mettre fin à ses jours. Si vous être physiquement présent ; si vous lui parlez au téléphone ou maintenez le contact par des messages quand vous ne pouvez pas être avec elle ; cela peut l’aider à se sentir moins seule et à ne pas avoir l’impression d’être un fardeau.

5. Aidez-la à avoir des contacts. - Aider une personne qui a envie de se suicider à prendre contact avec des êtres ou des organismes capables de la soutenir peut être un filet de sauvetage dans ses moments difficiles. Renseignez-vous à ce sujet. Il existe dans de nombreux pays des centres de prévention du suicide et diverses enquêtes indiquent que les personnes qui tirent profit de ces ressources ont moins tendance à être déprimées, sont moins tentées de mettre fin à leurs jours, se sentent moins perdues et deviennent plus positives.

6. Donnez suite. - Assurez-vous de suivre de près la situation, avec la personne suicidaire, une fois que vous l’avez aidée avec les étapes ci-dessus. Intéressez-vous à son état. Appelez-la au téléphone, envoyez-lui un message texté ou laissez un message sur son répondeur. Ce contact va augmenter son sentiment d’être liée à vous et d’avoir votre soutien. Le plus simple des contacts peut minimiser le risque qu’elle se suicide.

 

Divers signes de forte dépression

La dépression est un problème grave, en occident. Des millions de gens en souffrent plus ou moins.

D’après la faculté de médecine de Harvard, les formes les plus courantes de dépression passent pour des troubles dépressifs persistants majeurs (ou dysthymie).

Quand une personne est fortement déprimée, elle ne pense plus qu’à son état et cesse de s’intéresser à toutes les activités qu’elle aime normalement. Quiconque est fortement déprimé a le sentiment de n’être bon à rien et court le plus haut risque de chercher à se suicider.

Quand une personne souffre de troubles dépressifs persistants majeurs, elle en souffre pendant un certain temps (jusqu’à deux ans), mais pas autant que ceux qui souffrent de forte dépression. Elle peut toujours fonctionner normalement mais n’éprouve aucune joie et est désespérée.

Quand quelqu’un souffre de l’une de ces formes de dépression, il arrive que ce soit évident. Néanmoins, ce n’est pas toujours le cas. D’après l’Association des Pédiatres d’Amérique, les signes suivants comptent parmi ceux affichés par les personnes souffrant de dépression :

1. Une tristesse et un désespoir constants.

2. De l’irritabilité et de l’emportement, même pour des choses de peu d’importance.

3. Une perte d’intérêt pour des activités et passe-temps ordinairement agréables.

4. Des modèles anormaux de sommeil (pouvant aller de l’insomnie à des ensommeillements excessifs).

5. Un manque d’énergie continuel.

6. Des habitudes alimentaires anormales (pouvant aller d’un manque d’appétit à la boulimie).

7. Des difficultés à se concentrer, à réfléchir, à prendre des décisions et des pertes de mémoire.

Si l’un de vos amis ou un membre de votre famille affiche ces signes, il importe de maintenir le contact régulièrement avec cette personne et essayer de mieux comprendre ce qu’elle traverse et ressent.
Les personnes souffrant de dépression se sentent souvent coupables ou ont honte de ce qu’elles ressentent ; il importe donc de les approcher en faisant preuve de gentillesse, sans les juger.

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