La Chine peut-elle instaurer la paix au Moyen-Orient ?

Les sables mouvants politiques bougent à nouveau au Moyen-Orient avec l’apparition d’un nouveau négociateur de paix. La Chine sera-t-elle en mesure d’apporter la paix dans cette région troublée ?

Parce que l’on a qualifié de « poignée de mains » aux répercussions mondiales, l’Arabie Saoudite et l’Iran – ennemis jurés – ont conjointement signé un accord historique rétablissant leurs relations diplomatiques gelées depuis plusieurs décennies. Et ce qui est encore plus choquant, c’est que cette enjambée diplomatique est venue de Pékin, la Chine ayant réussi à négocier la paix. Ce coup d’éclat diplomatique a le potentiel de modifier les relations dans toute cette région, de la Syrie au Yémen, au même titre que les accords d’Abraham qui ont vu Israël normaliser ses relations avec plusieurs nations arabes. C’est la première fois que Pékin est intervenu si directement dans les rivalités du Moyen-Orient. Et cela laisse aussi pour compte les États-Unis, anciens négociateurs de la paix dans cette région.

La Chine saisit les rênes diplomatiques

Désireuse d’exploiter sa dynamique au niveau de son accord avec l’Arabie Saoudite et l’Iran, la Chine s’est mise à redoubler de charme et à se faire passer pour une négociatrice de paix au-delà du Moyen-Orient. Pékin a proposé un plan en 12 points pour conclure la paix entre la Russie et l’Ukraine. Et plus ambitieux encore, le ministres des Affaires Étrangères chinois Qin Gang a dit à ses homologues israélien et palestinien que son pays est disposé à négocier des pourparlers de paix afin de résoudre l’épineux conflit israélo-palestinien.

Pourquoi la Chine ? Pourquoi maintenant ?

La nature a horreur du vide, et il en va de même pour la politique. Les États-Unis s’étant retirés comme négociateurs au Moyen-Orient, la Chine les remplace petit à petit. Bien que les tentatives visant à instaurer la paix dans cette région aient souvent été un calice au contenu empoisonné, Pékin – déjà principal partenaire commercial du monde islamique – estime posséder à présent une assez forte armée et un poids économique suffisant pour commencer à façonner la région et le restant du monde à son image.

Positionner la Chine plus au centre de la scène mondiale est depuis longtemps un objectif du président chinois Xi Jinping en matière de politique internationale. Revigoré par son succès à imposer sa volonté à Hong Kong et dans la mer de Chine méridionale, le président Xi veut à présent que les nations – surtout celles au Sud du globe – voient la Chine comme une voix de la raison, un modèle économique et une puissance bénigne capable de tenir tête à l’ordre occidental dirigé par les États-Unis.

L’Arabie Saoudite et l’Iran – un affrontement de deux rivaux religieux

Historiquement, l’Arabie Saoudite a suivi la branche sunnite de l’Islam (de pair avec pratiquement 90% de tous les croyants musulmans), tandis que l’Iran a suivi la branche chiite. La séparation des deux branches date du septième siècle quand on s’est mis à débattre au sujet du successeur légitime de Mahomet. Dans les temps modernes, l’Arabie Saoudite – conduite par la maison royale des Saoud et, tacitement, un allié occidental – a dirigé l’OPEC, stabilisant le marché mondial du pétrole. Entre-temps, la révolution iranienne s’est choisie l’Ayatollah Rouhollah Khomeini comme chef, et l’Iran s’est mis à soutenir des groupes radicaux révolutionnaires chiites dans d’autres pays de la région.

Bien que l’Iran et l’Arabie Saoudite ne se soient pas ouvertement fait la guerre, Riyadh estime depuis longtemps que la menace à sa sécurité se situe dans Téhéran et les groupes armés qu’il soutient dans les pays voisins. Ce danger a été renforcé par des attaques de missiles lancés par des drones, contre les sites pétroliers saoudiens en 2019, qui ont temporairement démoli 5% des approvisionnements globaux quotidiens en pétrole. En dépit des garanties américaines de veiller à leur sécurité, l’absence de riposte militaire de la part des États-Unis a poussé les États du Golfe Persique à se dire que la puissance et l’influence américaines avaient diminué et que le réseau d’alliance américain a été sérieusement endommagé.

La religion du pétrole

Assoiffée du pétrole dont elle a besoin pour alimenter son ascension en tant que puissance globale, la Chine s’est montrée capable de travailler avec les nations aussi bien sunnites que chiites. Pékin est devenu le plus grand importateur mondial d’or noir. La Chine représentait 30% du commerce extérieur de l’Iran, du 21 mars au 21 novembre 2022, mais l’Arabie Saoudite était le principal fournisseur de pétrole brut de la Chine, la même année. Son deuxième fournisseur – la Russie – étant « mêlée à des vulnérabilités dues à la guerre », la prétention de Pékin selon laquelle « la Chine agit de manière tout à fait désintéressée » ne sonne pas très juste.

L’Amérique se désiste

Il y a 50 ans, au début de la guerre du Kippour de 1973, les États-Unis se sont avérés être les principaux garants de la stabilité au Moyen-Orient et dans le Golfe Persique. Le secrétaire d’État américain Henry Kissinger avait présidé aux pourparlers de paix entre Israël et l’Égypte, puis entre Israël et la Syrie. L’Union Soviétique avait été tenue à l’écart du processus, l’Europe passait pour militairement insignifiante, et la Chine pour économiquement superflue.

Revenons au présent. Bien que la technologie et les équipements militaires américains soient encore recherchés, les bavures diplomatiques de ce pays dans cette région se sont multipliées, et la dépendance des États-Unis à l’égard des carburants fossiles a fortement diminué. Avec l’introduction de la fracturation hydraulique et du forage horizontal, la révolution du gaz de schiste a augmenté la production domestique énergétique américaine. À présent, les États-Unis importent approximativement 7% de leur pétrole, de l’Arabie Saoudite.

Après avoir mené la barque pendant plusieurs décennies, l’Amérique subit à présent le contre-coup de ses guerres coûteuses contre le terrorisme en Iraq et en Afghanistan. Le chaos qui en a résulté a consumé une bonne partie de son capital diplomatique dans la région. Sa lassitude envers le Moyen-Orient et le repli honteux de ses troupes d’Afghanistan en août 2021 ont permis à la Chine d’ébrécher adroitement sa suprématie dans la région. Cela a poussé les États arabes à s’adresser à une autre superpuissance et à améliorer leurs relations avec elle.

En tant que candidat à la présidence américaine, Joe Biden a publiquement traité l’Arabie Saoudite d’État paria et a accusé le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane d’avoir personnellement violé les droits de l’homme. Pourtant, en dépit de l’atmosphère glaciale entourant sa visite dans ledit royaume, l’an dernier, le président Biden a promis : « Nous n’allons pas nous désister et laisser un vide susceptible d’être comblé par la Chine, la Russie ou l’Iran. »

Quoi qu’il en soit, alors que de fragiles accords se dessinent au Moyen-Orient, les pays dans cette région instable cherchent de nouveaux alliés et abandonnent une Amérique dont l’influence s’effiloche.

Un pacte d’apathie

La stupéfiante percée diplomatique récente a eu lieu, du fait que trois pays – l’Iran, l’Arabie Saoudite et la Chine – ont obtenu bien plus que des victoires économiques et sécuritaires. En réduisant les tensions entre Riyadh et Téhéran et en ne prenant pas parti, Pékin crée un axe d’autocrates qui se comprennent. Ce qui est significatif dans les liens croissants entre la Chine et le Golfe, c’est la position mutuelle que ces nations ont prise de ne pas critiquer ou de se mêler des affaires internes des autres partenaires. En fait, le président Xi a récemment réitéré sa promesse que la Chine et ses alliés du Moyen-Orient « continueront de brandir bien haut la bannière de la non-ingérence dans les affaires internes (de chacun d’eux) ».

Pour des pays comme l’Arabie Saoudite et l’Iran – pour qui ce qui se passe chez eux ne regarde personne d’autre et qui violent la déclaration des droits de l’homme – une telle offre est alléchante. Cette approche diplomatique d’indifférence contraste étonnamment avec celle de l’administration américaine que beaucoup, dans la région, estiment être une obsession moralisatrice pour les droits de l’homme, incompatible avec les pratiques religieuses islamiques.

En échange de la paix

La Chine n’est pas une novice au Moyen-Orient. Elle a vu l’Amérique épuiser ses ressources, mener des guerres interminables en essayant vainement d’établir des démocraties islamiques. Elle s’est contentée de faire « seulement des affaires » avec Téhéran, abandonnant son utilisation du charbon au profit du pétrole. L’Iran a échangé son pétrole contre la technologie militaire chinoise et cela lui a permis de développer des armes modernes. Par un accord pétrolier massif de $400 milliards en 2021, la Chine a procuré à l’Iran en difficulté un répit financier. Ce pays à majorité chiite se débat avec des manifestations internes tout en essayant de rafistoler son économie suffoquée par des sanctions internationales. En dépit des rameaux d’oliviers qui lui sont tendus, l’Iran, soutenu par la Chine, demeure hostile à l’Arabie Saoudite à propos des questions religieuses, idéologiques et stratégiques les plus fondamentales.

Le robinet doit rester ouvert

La plupart des investissements tant vantés de « la ceinture économique de la route de la soie » chinoise au Moyen-Orient dépend des craintes que les réseaux d’approvisionnement en pétrole puissent être perturbés par les États-Unis ou l’Inde – superpuissance croissante rivale de la Chine. Pour contrer l’éventuelle menace, l’Iran et la Chine mettent en branle un accord de coopération stratégique de 25 ans capable de fournir à la Chine un accès à des installations navales dans le Golfe Persique où à proximité. La Chine a également investi dans des ports à potentiel militaire – décrits comme un réseau en « collier de perles » – à des points stratégiques maritimes vulnérables comme le Golfe Persique, le golfe d’Oman, la mer Rouge, le détroit de Bab-El-Mandeb, le détroit d’Hormuz et le canal de Suez.

Bien qu’elle ait connu des années d’énormes revenus pétroliers, l’Arabie Saoudite affronte la menace croissante de l’Iran possédant l’arme nucléaire. Cette menace – de pair avec les attaques incessantes de sbires iraniens au Yémen – incite l’Arabie Saoudite à vouloir posséder des armes nucléaires, des drones et des missiles balistiques. Ne faisant pas confiance aux États-Unis, Riyadh a fait savoir qu’elle va protéger ses intérêts nationaux en faisant la cour à la Chine.

Des souverains au Moyen-Orient achètent volontiers des actions chinoises et parlent de l’adoption à grande échelle du pétro-yuan pour régler leurs achats pétroliers. De surcroît, les Saoudiens ont déjà annoncé leur intention de se joindre à l’alliance chinoise commerciale, politique et sécuritaire qu’est l’Organisation de Shanghai pour la coopération et dont les membres à part entière sont la Chine, la Russie, l’Inde, le Pakistan et quatre autres nations asiatiques.

Des dirigeants qui ont une âme sœur

Le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane et le président chinois Xi Jinping sont des penseurs téméraires et convaincants qui voient loin et qui ont des ambitions très analogues. En plus d’aider l’Arabie Saoudite à fabriquer ses propres missiles balistiques dans son programme nucléaire, la Chine a investi dans « Vision 2030 » – le projet personnel du prince Mohammed de construire une cité futuriste dans le désert, qui ferait de son royaume bien autre chose que le plus grand pays producteur de pétrole du monde. Misant sur son projet colossal de ceinture et de route de la soie, la Chine espère mettre en branle cette énorme entreprise.

Que dire d’Israël ?

Bien que le pétrole soit ce dont la Chine a surtout besoin dans l’immédiat, on prévoit que l’empreinte de cette dernière au Moyen-Orient va dominer les technologies futures. Bien que la Chine domine 37 des 44 technologies clés de la prochaine génération – y compris l’intelligence artificielle, les métamatériaux et la technologie hypersonique – elle envie secrètement les secteurs de pointe biotechnique, spatial et d’informatique quantique d’Israël. D’après l’analyste géopolitique Brandon J. Weichert, la Chine cherche à isoler, influencer et absorber Israël, à faire de cette dernière démocratie du Moyen-Orient « un canal permettant à la Chine de développer son initiative de haute technologie de ceinture sur son ancienne route de la soie. Cela obligerait aussi le restant du monde à dépendre de la Chine pour son infrastructure de haute technologie pratiquement comme les Américains ont obligé le monde à dépendre de leur haute technologie ».

Connaîtra-t-on la paix ?

La présence de la Chine dans les négociations diplomatiques de paix est une habile stratégie pour éliminer progressivement l’influence américaine au Moyen-Orient et revendiquer les richesses énormes de la région en pétrole et en gaz naturel. L’Amérique a été mise au rancart des médiations et le monde ne la respecte plus. Des prophéties bibliques rédigées il y a plusieurs millénaires, révèlent que les nations représentant les descendants modernes des 12 tribus de l’ancien Israël – y compris les États-Unis – allaient perdre l’orgueil de leur force à cause de leurs péchés nationaux (Lévitique 26 ; Deutéronome 28:15-68).

Bien que la Bible n’annonce pas une guerre entre la Chine et l’Amérique, elle décrit une grande puissance s’élevant en orient. Ce bloc puissant comprendra indubitablement la Chine et plusieurs autres puissances de la région (Daniel 11:44). Cette puissance militaire sera contrée par un rival que la Bible appelle « la bête » – superpuissance qui sidérera le monde entier (Apocalypse 9:14-16; 13:1-8; 16:12) et sera dirigée par un chef dynamique et féroce associé à un puissant système religieux dirigé par un personnage charismatique. Cette puissance, décrite par l’apôtre Jean comme détenant une puissance militaire, économique et religieuse sans précédent (Daniel 11:40-45 ; Apocalypse 18:2-3 ; 9-14) sera la dernière renaissance du Saint-Empire romain (Apocalypse 13:1-8; 17:8-18; Daniel 7:15-27).

Cette superpuissance européenne essaiera d’instaurer la paix au Moyen-Orient d’une manière entièrement différente (Daniel 11:40-42). L’Europe, bien qu’étant à présent économiquement forte, n’est encore qu’un nain militaire. Sous peu, cela va considérablement changer. Avant que cela se produise, lisez les avertissements bibliques sur le temps de la fin, ainsi que ses promesses d’une vraie paix durable et proche qui ne s’appuiera ni sur des besoins commerciaux ni sur des craintes de sécurité, dans notre brochure gratuite L’Apocalypse : la tempête avant le calme.

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