Dieu est amour. Étant chrétiens, nous sommes appelés à lui ressembler. Or, il nous dit de ne pas aimer le monde ni les choses qui sont dans le monde. Que veut-il dire par là ? Comment est-ce possible ?
« N’aimez point le monde, ni les choses qui sont dans le monde » (1 Jean 2:15). C’est là un défi de taille ! Ne vivons-nous pas dans le monde ? N’offre-t-il pas de bonnes choses ? Pourquoi Dieu nous dit-il de ne pas les aimer ? Comment peut-il dire une chose pareille, lui qui « a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle » (Jean 3:16) ? Ne semble-t-il pas se contredire ? Si nous croyons que la Bible est sa parole inspirée, nous savons qu’elle ne se contredit pas, et il importe que nous étudiions la question de plus près. En tant que chrétiens, il importe que nous comprenions pourquoi Dieu a inspiré l’apôtre Jean de nous avertir de ne pas « aimer » le monde.
Le monde dont Jean voulait parler
Pour comprendre ce passage, nous devons commencer par comprendre les mots employés. Dans la langue grecque originale du Nouveau Testament, les mots dont se sert Jean pour « monde » (kosmos) et pour « aimez » (agapaò) peuvent avoir divers sens, comme en français. Dans la Bible, lorsqu’il est question du monde, ce mot décrit souvent les caractéristiques morales, spirituelles et physiques de l’espèce humaine qui agissent indépendamment de – et sont souvent opposées à – la ligne de vie de Dieu. Jean a expliqué que « si le monde ne nous connaît pas, c’est qu’il ne l’a pas connu » (connu Dieu ; 1 Jean 3:1). Paul a précisé que « l’affection de la chair est inimitié contre Dieu, parce qu’elle ne se soumet pas à la loi de Dieu, et qu’elle ne le peut même pas » (Romains 8:7 ; c’est nous qui soulignons tout du long). William Barklay a écrit que « kosmos a pris un sens moral. Il s’est mis à signifier le monde, retranché de Dieu » (The Letters of John and Jude, p. 63).
Autrement dit, Jean ne nous a pas avertis de ne pas aimer le monde physique que Dieu a créé et il ne nous a pas mis en garde de ne pas aimer l’espèce humaine qui l’habite. Quand il dit « N’aimez point le monde, ni les choses qui sont dans le monde », il nous dit de ne pas nous attacher à un mode de vie dont Dieu ne fait pas partie. Un fossé immense sépare le monde rempli de « ceux, qui vivent selon la chair » (Romains 8:5) du peuple de Dieu, de « ceux qui vivent selon l’Esprit » et qui « s’affectionnent aux choses de l’Esprit » (ibid.). Bien que nous habitions tous sur la même planète, selon la Bible, nous autres chrétiens vivons dans deux mondes différents.
L’amour dont parlait Jean
Jean a poussé son avertissement jusqu’à dire : « Si quelqu’un aime le monde, l’amour du Père n’est point en lui » (1 Jean 2:15). Non seulement aimer le monde est une mauvaise idée, mais Jean veut que nous comprenions qu’aimer le monde est incompatible avec l’amour de Dieu. Quand on comprend ce que Jean entendait par « le monde », il devient clair que les deux sont incompatibles. Comment peut-on aimer Dieu et une optique qui le rejette totalement ?
Et ce n’est pas tout. Jean contrastait aussi deux sortes d’amour. Il ne voulait pas parler du type d’amour altruiste qui souhaite ce qu’il y a de meilleur pour le prochain ; il parlait de certains désirs. « Dans ce passage […] il est question du plaisir que la personne espère recevoir de l’objet de son amour. Aimer, dans ce cas, revient à être attiré par quelque chose dont on veut jouir ; il y a l’idée d’appétit, de désir » (I. Howard Marshall, The Epistles of John, p. 143).
Ici, aimer le monde ne signifie pas se soucier du monde comme Dieu s’en soucie ; il s’agit de vouloir faire partie du monde, de désirer ce qu’il a à offrir, de chercher à posséder ce qu’il offre au niveau de ses valeurs. Jean précise sa pensée : Si nous désirons nous identifier à un monde qui fonctionne indépendamment de Dieu, c’est que nous n’aimons pas Dieu.
Comment identifier « les choses qui sont dans le monde »
Pour renforcer sa pensée, Jean fournit trois éléments distinctifs identifiant « ce qui est dans le monde » (Nouvelle Bible Segond), trois traits nous permettant de déterminer si nous aimons vivre d’une manière qui rejette Dieu :
« Tout ce qui est dans le monde, la convoitise de la chair, la convoitise des yeux, et l’orgueil de la vie, ne vient point du Père, mais vient du monde » (1 Jean 2:16). Une fois encore, il importe de noter les mots dont Jean s’est servi. Par exemple, quand Jean parle de « convoitise », en grec, il est question d’un désir intense (epithumia). Ce qui n’est pas nécessairement mauvais ; Jésus déclara : « J’ai désiré vivement [epithumia] manger cette Pâque avec vous » (Luc 22:15). Nos désirs deviennent problématiques quand ils nous mettent en porte-à-faux avec Dieu et nous poussent à faire des choses qu’il nous interdit de faire (Jacques 1:14-15).
Les trois signes caractéristiques dont parle Jean soulignent trois désirs qui peuvent faire cela précisément. La convoitise de la chair, la convoitise des yeux, et l’orgueil de la vie ne sont pas des désirs chrétiens ; ils sont typiques d’un monde qui ignore Dieu et s’oppose à son règne.
La convoitise de la chair
Barclay a écrit : « Le désir de la chair fait fi des commandements, du jugement, des standards et de l’existence même de Dieu » (The Letters of John and Jude, p. 64). La chair (notre corps physique), à l’instar du monde, ne s’intéresse pas à ce que Dieu veut ; ce qui l’intéresse, c’est ce qu’elle veut. Dieu a certes prévu que nous ayons certains désirs, et que nous en jouissions quand ils sont satisfaits. Nous désirons divers mets, et la nourriture peut être délicieuse. Nous désirons l’amitié, qui peut être enrichissante, etc. Néanmoins, Jean parlait d’une vie motivée par les désirs de la chair, où la chair dicte quoi faire et quand le faire.
Dieu ne souhaite pas que nous devenions des acètes, que nous nous privions des bonnes choses que la vie peut nous offrir, mais il ne veut pas que nous devenions hédonistes. Ces hédonistes « ont pour dieu leur ventre, ils mettent leur gloire dans ce qui fait leur honte, ils ne pensent qu’aux choses de la terre » (Philippiens 3:19). Quand nous laissons les désirs de la chair nous dicter ce que nous faisons, nous nous distançons de Dieu et nous nous identifions au monde.
La convoitise des yeux
Parallèlement, la convoitise des yeux est, en somme, « la tendance à se laisser captiver par l’apparence extérieure des choses sans s’enquérir de leur valeur réelle » (C.H. Dodd, Johannine Epistles, p. 41) ou, plus poétiquement, de « l’amour de la beauté divorcée de l’amour de la bonté » (Robert Law, The Tests of Life, p. 151). Nos yeux remarquent ce qui est attirant, mais si ce qui nous attire est notre seul standard – si nous ne nous soucions que de ce qui a belle allure – nous entrons naturellement en conflit avec Dieu : « L’Éternel ne considère pas ce que l’homme considère ; l’homme regarde à ce qui frappe les yeux, mais l’Éternel regarde au cœur » (1 Samuel 16:7). Si nous recherchons et désirons ce qui est agréable à regarder – si nous ne prenons jamais le temps de demander à Dieu de nous montrer ce qui est réellement bon, selon lui – les désirs de nos yeux nous éloignent aussi de lui.
L’orgueil de la vie
Une fois encore, le choix des mots de Jean est significatif. Dans le grec, l’expression « l’orgueil de la vie » peut aussi être traduite par « l’orgueil des biens physiques » ou « l’orgueil vide de la vie ». Elle se base sur un mot qui sous-entend « la vantardise qui exagère ce que l’on possède afin d’épater les autres » (Marshall, The Epistles of John, p. 145). La convoitise de la chair et des yeux culmine dans l’orgueil vide de la vie – le besoin constant de se donner de l’importance et de passer pour quelqu’un qui a réussi aux yeux des autres, sans se soucier de la vérité. Peu importe l’importance de nos biens physiques, l’orgueil de la vie est un désir qui nous pousse à exagérer et à nous vanter de nos réalisations. Une existence vide de sens qui exige que nous ignorions les vraies richesses spirituelles que Dieu a à offrir.
Le monde passe, et sa convoitise aussi ; mais pas le peuple de Dieu
Jean conclut sa pensée en mettant l’accent sur l’ultime folie consistant à réclamer ce que le monde a à offrir : « Le monde passe, et sa convoitise aussi ; mais celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement » (1 Jean 2:17). Le monde dont Dieu nous dit de nous séparer finira tout compte fait. Séparé de Dieu, ses plaisirs sont temporaires et vides. En tant que chrétiens à l’œuvre, nous ne pouvons pas nous permettre d’aimer, de désirer et de réclamer ce que ce monde a à offrir et son orgueil vide. Nous attendons, selon la promesse divine, « de nouveaux cieux et une nouvelle terre, où la justice habitera » (2 Pierre 3:13). Un monde meilleur s’annonce. N’y renoncez pas pour un monde qui va disparaître.
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