Comment pardonner à ceux qui nous font du mal

Il n’est guère facile d’absoudre nos ennemis. Et qu’en est-il quand un autre chrétien, ou un ami, ou un membre de notre propre famille nous fait du mal ?

Les déclarations les plus explicites sont parfois les plus difficiles à pratiquer. Des millions de gens ont probablement répété les paroles de Jésus dans son schéma de prière « Pardonne-nous nos offenses, comme nous aussi nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés » (Matthieu 6:12). Et des millions de gens se sont probablement aperçus que – bien qu’il soit facile de souhaiter que Dieu nous pardonne – il est souvent bien difficile de pardonner les fautes de nos pairs.

On se dit parfois qu’il est plus difficile de pardonner à un ami qu’à un ennemi. Pourquoi ? Parce que nous nous attendons à ce que des étrangers nous fassent du mal, et non des amis ou des proches ; et quand ces amis ou ces proches nous font mal, ces blessures sont profondes. Quand un ami, un membre de notre famille ou un autre chrétien nous blesse, nous avons souvent l’impression d’avoir été trahis.

Pardonner est un défi, mais c’est une nécessité (Matthieu 6:14-15). Nous vous proposons quatre clés pour s’acquitter de ce devoir :

1. Le temps – et des efforts répétés – guérit toutes les blessures.

Le vieil adage « Le temps guérit toutes les blessures » est loin d’être réaliste. Ne soigneriez-vous pas une grave blessure physique ? Guérirait-elle d’elle-même au bout d’un certain temps ? Nullement ! De même que toute blessure grave doit être soigneusement traitée pendant longtemps, il en va de même pour toute blessure sentimentale. Le pardon est un traitement majeur pour une bonne santé mentale et spirituelle. Cependant, pardonner aux autres – même si cela prend souvent du temps – requiert habituellement deux éléments clés supplémentaires : de gros efforts et une attention soutenue.

Notre Dieu parfait peut instantanément effacer nos péchés, les éloigner autant que l’orient l’est de l’occident (Psaume 103:12), mais pour nous autres, faibles humains, c’est bien plus difficile. Pour nous, pardonner est souvent un processus répétitif exigeant de gros efforts, et du temps. Avez-vous jamais pensé avoir pardonné à quelqu’un pour ensuite découvrir, lorsque quelque chose vous avait rappelé une expérience négative, que vos sentiments négatifs à l’égard de cette personne avaient promptement ressurgis ? Que faire en pareil cas ? Passez l’éponge ! Et assurez-vous qu’il n’en reste rien !

Il nous arrive parfois de devoir de nouveau pardonner ce que nous avons déjà pardonné ! C’est souvent ce qui se passe. Néanmoins, avec des efforts répétés, nous finirons par faire du pardon une habitude. J’ai connu une femme qui avait longtemps été maltraitée par son conjoint. Ses blessures étaient profondes, mais elle savait que l’amertume risquait de la ronger et que le pardon était l’outil dont Dieu se servirait pour l’aider à en guérir. Quelques années plus tard, elle m’a confié que cela lui avait pris cinq ans pour y parvenir, ayant à fournir des efforts constants, ne cessant de prier Dieu qu’il l’aide à pardonner et à ne pas s’aigrir. Puis le jour était venu où, enfin, elle s’était sentie libérée. Ses blessures avaient enfin disparu. Mais c’était possible uniquement parce qu’elle avait lutté avec ténacité pour suivre Dieu et faire ce qui est juste. À aucun moment elle ne s’était dit que pardonner lui était impossible. Elle avait persévéré, demandant constamment l’aide divine, parce c’était ce qui est juste.

Ce qui la motivait, c’était cependant bien plus que son simple désir d’accéder à une certaine sérénité. Elle savait ce que dit la première partie d’Éphésiens 4:32 – que nous devons nous pardonner réciproquement – mais aussi le restant, qui précise : « comme Dieu vous a pardonné en Christ ». Elle se souvenait être allée à Dieu bien des fois, l’implorant de lui pardonner d’avoir été en partie responsable de la mort de Christ – ce que nos péchés à tous ont causée (Actes 2:36-38) – et de lui faire grâce. Nous aussi, nous devons imiter sa grâce et l’appliquer à ceux qui nous font du mal. C’est certes difficile, et il se peut que nous ayons à y travailler avec un certain acharnement, mais pardonner guérit les blessures.

2. Le raisonnement fallacieux « pardonnez et oubliez »

On me dit parfois ne savoir quoi penser, me disant se souvenir, en détails, des péchés commis par d’autres et me demandant : « Ne sommes-nous pas supposés pardonner et oublier ? Or, ces souvenirs restent gravés dans mon esprit. Si je m’en souviens, cela veut-il dire que je n’ai pas vraiment pardonné ? » Pardonner est-il synonyme d’oublier ? Si pardonner, c’est aussi oublier, sommes-nous capables, nous autres humains, d’une telle chose ? Quand Dieu déclare : « Je ne me souviendrai plus de leurs péchés ni de leurs iniquités » (Hébreux 8:12 ; 10:17), établit-il un standard que nous devons adopter ?

Bien que Dieu s’attende à ce que nous nous pardonnions les uns les autres, il ne nous a pas créés avec la capacité d’effacer nos souvenirs. Il veut simplement que nous apprenions à gérer convenablement notre mémoire et à nous en servir positivement. De nombreux passages bibliques nous enjoignent de nous souvenir, et parfois, ces souvenirs sont douloureux. À cinq reprises, dans le Deutéronome, Dieu dit à Israël : « Tu te souviendras que tu as été esclave au pays d’Égypte » et il lui dit de se souvenir qu’il l’en a délivré. Cela devait être très douloureux – ils devaient se rappeler la brutalité des Égyptiens et même le massacre de leurs enfants. Nous pouvons nous aussi nous souvenir que nous étions esclaves du péché, et la douleur que certaines de ces fautes nous a causée. Nous pouvons aussi nous rappeler que les péchés commis par d’autres nous ont parfois infligé de grandes souffrances.

Notons cependant ce que Dieu ajoute : « Tu te souviendras que tu as été esclave en Égypte, et tu prendras garde à pratiquer ces statuts » (Deutéronome 16:12 ; version Ostervald ; c’est nous qui soulignons tout du long). Il n’est pas écrit : « Tu te souviendras, et tu n’oublieras jamais ce qu’ils t’ont fait, afin de te venger ! » Nullement ! Nous devons nous souvenir de nos souffrances afin d’apprendre à vivre à la manière divine. L’un des avantages majeurs de notre mémoire n’est-il pas que nous puissions retenir les leçons que nous apprenons dans la vie et évitions de répéter nos erreurs, y compris les fautes d’autres individus qui nous ont profondément blessés ?

Quand nous nous efforçons de pardonner aux autres, il n’y a aucun mal à demander à Dieu de nous aider à oublier leurs offenses. Néanmoins, si ces souvenirs nous reviennent à l’esprit – et même si nous passons du temps à nous remémorer le passé – cela ne veut pas dire que nous n’avons pas pardonné.

Il arrive que certaines situations fassent ressurgir des évènements désagréables. Parfois, nous voyons quelque chose à la télévision, entendons une chanson, ou voyons quelqu’un, et cela nous rappelle immédiatement une situation qui nous a fait mal. Ce que nous faisons de nos souvenirs détermine si c’est positif ou négatif. Il se peut que vous ressentiez momentanément une certaine émotion, que vous vous mettiez en colère ou que vous soyez déprimé en pensant à ce qui vous avait blessé ou offensé ; cela ne veut pas dire que vous n’avez pas déjà pardonné ce que l’on vous a fait. Ce que cela peut vouloir dire, c’est que vous devez de nouveau accorder le pardon que vous avez antérieurement accordé.

Il est tout naturel de se souvenir du passé, mais il faut que nous le rendions productif. Ruminer le passé en « repassant l’enregistrement » maintes fois dans votre esprit ne fera que vous inciter à devenir amer ou rancunier. Par contre, quand on cherche de tout cœur à pardonner, les mauvais souvenirs s’estompent et ressurgissent de moins en moins souvent et – ce faisant – l’envie de riposter ou de se venger s’amenuise. La douleur diminue parce que la blessure est de moins en moins apparente et plus difficilement irritée.

Rappelons-nous ce qu’a écrit Paul : « Oubliant ce qui est en arrière et me portant vers ce qui est en avant, je cours vers le but, pour remporter le prix de la vocation céleste de Dieu en Jésus-Christ » (Philippiens 3:13-14). Notons au passage qu’il n’avait pas oublié le passé. Quelques versets plus haut, il venait de décrire plusieurs de ses expériences douloureuses passées, et il les regardait « comme de la boue » ou « comme des ordures » (verset 8 ; version Ostervald). Si ces souvenirs n’avaient pas été effacés, il ne s’attardait cependant pas sur ses fautes passées ou sur les offenses qu’on lui avait faites. Il connaissait son passé, mais il savait aussi qu’il avait été pardonné, qu’il pardonnait aux autres, et cela le maintenait sur la bonne voie.

N’essayez pas d’oublier après avoir pardonné. C’est impossible ! Néanmoins, fixez vous l’objectif de gérer positivement vos souvenirs, grâce au Saint-Esprit, apprenant, croissant, et vous rapprochant de plus en plus de votre Père céleste.

3. Pardonner ne nettoie pas toujours la saleté

Pardonner n’élimine pas toujours chaque amende du péché – les dégâts qu’il provoque. Même après que Dieu ait éliminé l’amende spirituelle de la mort éternelle dans nos vies, nous continuons parfois de subir certaines répercussions de nos actions. Par exemple, après avoir abusé de son corps pendant des années en fumant, une personne peut se repentir et cesser de fumer. Mais j’ai connu des chrétiens, à qui Dieu avait pardonné, et qui sont pourtant morts d’un cancer du poumon. Faut-il en conclure que si un fumeur repentant meurt malgré tout d’un cancer – c’est que Dieu ne lui a pas pardonné ? Nullement ! Même après que Dieu nous ait pardonnés, nous subissons parfois encore des séquelles physiques et émotionnelles de nos erreurs.

Il en va de même pour nos relations avec nos pairs. Même si nous pardonnons, les conséquences des fautes commises demeurent parfois. Souvent, nos relations en pâtissent, nos mariages se brisent, nous perdons des amis et la confiance de certains. Quand nous pardonnons, une réconciliation n’est pas toujours possible. Il est merveilleux de voir des êtres se pardonner et les séquelles disparaître, mais ce n’est pas toujours ce qui se passe. Et cela est dû à ce que toute réconciliation exige deux éléments chez les personnes impliquées : le repentir et le pardon. Si, par exemple, un individu en maltraite un autre et provoque de gros dégâts, il n’y a que quatre résultats possibles pour leur relation :

  1. Le coupable ne se repent pas, et la victime ne pardonne pas (c’est le pire scénario).

  2. Le coupable se repent, mais la victime ne lui pardonne pas

  3. Le coupable ne se repent pas, mais la victime lui pardonne malgré tout.

  4. Le coupable se repent et la victime lui pardonne.

Seul le dernier cas a le meilleur scénario ; une réconciliation a lieu. Dans le premier cas, personne ne fait bien. Dans les deuxième et troisième cas, l’un fait sa part, mais l’autre non ; la personne qui fait ce qui est juste est justifiée devant Dieu, mais les rapports sont tendus ou inexistants et il n’y a pas de réconciliation. Tant qu’une saine réconciliation n’a pas lieu, les séquelles demeurent, même si le ou la coupable a été pardonné(e).

4. Errer est humain, pardonner est divin.

La remarque d’Alexander Pope contient une bonne part de vérité. Tous les humains peuvent pardonner certaines offenses. Quand un bambin s’écrie, chez l’épicier, à l’intention d’un client, « tu es vieux et tu es gros ! » et que sa mère, confuse, demande à l’homme de pardonner à l’enfant son impertinence, le client en question peut être blessé mais pardonner l’offense de l’enfant.

Néanmoins, tôt ou tard, nous avons du mal à pardonner et n’en sommes pas capables, seuls. Nous avons besoin d’un élément… divin ; de pensées divines, de l’aide de Dieu. Notre capacité à pardonner ne peut provenir que de l’action, en nous, de notre Père céleste qui nous permet d’accéder à un plan supérieur de réalisation spirituelle dont nous ne sommes pas intrinsèquement capables. C’est dans de tels moments que nous implorons humblement Dieu de nous aider : « Je suis si blessé que je ne parviens pas à pardonner. Pourtant, je veux faire ta volonté. Je ne veux pas que cela me ronge ou nuise à ma relation avec toi ou avec d’autres. Donne-moi, je te prie, la sagesse et la persévérance dont j’ai besoin pour cette situation ! »

Pardonner est souvent compliqué et c’est parfois humainement parlant impossible, mais avec l’aide de Dieu, nous pouvons relever ce défi !

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